Magnifique rencontre...
Je me suis rappelé ce rêve, ce rêve magnifique que j'avais fait lors de
mon premier voyage dans l'Autre Monde. Je me rappelais la boisson que
m'avait donné Evezhierez et mon sommeil, profond, qui m'avait plongé
dans un rêve si réel que je ne sais toujours pas si je l'ai vraiment
vécu ou pas.
Le souffle rauque du dragon me sorti de mes souvenirs. Il n'était plus
qu'à quelques pas de moi maintenant, immense, et magnifique... Il était
vraiment comme je l'avais rêvé, d'un bleu azur aux milles reflets
irisés, ses ailes et son corps dégageaient une aura qui avait les
couleurs de l'arc-en-ciel. Sa tête était toute crénelée, dure et douce
à la fois, et ses yeux... Je ne pouvais pas le regarder dans les yeux,
mon corps s'y perdait comme dans un abîme sans fond...
Il se rapprocha encore de moi, ou plutôt elle. Je compris sans trop
savoir comment que c'était une dragonne, je le ressentais, et je
sentais son souffle sur mon visage. Elle n'était plus qu'à un mètre de
moi et je ne pouvais toujours pas bouger. Elle se redressa alors,
majestueuse, et je n'eus que le temps de sauter avant qu'elle ne lâche
sur moi son feu brûlant. Je n'avais plus du tout envie de rester
immobile, courant dans tous les sens, espérant atteindre la forêt toute
proche. La terre tremblait sous ses pas et son feu brûlait tout sur son
passage. Sauf moi. J'étais pour le moment épargné, par je ne sais quel
miracle de son souffle mortel. La forêt était maintenant à quelques
mètres. Si je pouvais l'atteindre, je serais un peu plus en sécurité,
la dragonne étant trop grande pour s'engager entre le dense rideau
d'arbres.
Trop tard. Elle avait attrapé mon lambeau de chemise et me secouait
dans tous les sens, jusqu'à ce que ça craque. Je me sentis décoller,
comme un oiseau, mais sans ailes, et l'atterrissage fut douloureux. Les
branches me griffèrent de partout, s'accrochant aux moindres plis de
mon jeans, à la moindre parcelle de peau encore intacte. Et le choc sur
le sol me déboita le bras gauche. Je ne ressentis pourtant aucune
douleur, la peur me tenaillant le ventre m'obligeait à fuir, courir le
plus loin possible sans prendre garde à ce qui pouvait m'arriver.
Les sous bois étaient presque impénétrable mais je savais que la
dragonne était à ma poursuite et je m'y frayais un chemin à travers les
ronces et les fougères immenses, jusqu'à ce que j'arrive dans une
clairière. Je pris le risque de la traverser, pour fuir encore plus
loin, quand la dragonne fut sur moi. Littéralement. Je n'eus que le
temps de faire quelques pas en arrière, pour finir par terre, vaincu
par une pierre très mal placée.
La dragonne s'approcha alors, lentement, la gueule entrouverte
dévoilant ses dents immenses et menaçantes. Au moment où elle s'apprêta
à m'avaler sans autre forme de procès, quelque chose la retint. Quelque
chose qui commença à me brûler la poitrine. Le médaillon. La dragonne
referma sa gueule et approcha tout doucement son museau qui alla
jusqu'à me toucher. Je ne respirais même plus, n'osant pas troubler cet
instant magique. Je pouvais distinguer le moindre relief de son visage,
la beauté de ses écailles irisées, et ses yeux de braise. Toujours ses
yeux...
La dragonne se redressa quelque peu puis me saisit dans sa gueule, mais
sans violence, comme une chatte attrape son chaton pour le ramener dans
le petit nid douillet. Elle me remit sur pied et sembla me demander
quelque chose, comme si elle voulait que je monte sur son dos. Ce
sentiment se fit de plus en plus fort et je m'approchais, doucement, de
son poitrail. Elle se baissa, montrant clairement son intention de
m'emmener faire un tour dans ce monde aérien.
Je me calais confortablement entre deux écailles et regardais une
dernière fois cette petite clairière, témoin d'une rencontre plus que
magique. Et c'est là que je La vis. Elle. Elle se distinguait à peine dans les flots de la cascade qui bordait la clairière, mais j'étais sur de Sa présence, Elle était là et je sentais Son regard dans le mien.
La dragonne décida alors de s'élancer, et Elle disparut...